Quand l'UFC-Que Choisir tire à boulets rouges sur le CITE

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L'amélioration de la performance énergétique des logements français, pourtant érigée en priorité par les gouvernements successifs, est-elle réellement prise au sérieux et dotée des moyens suffisants ? Une étude récente de l'association de consommateurs UFC-Que Choisir vient semer le trouble à peine quelques semaines avant le début de la conférence internationale COP21.

En ligne de mire : le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), qui propose aux foyers une diminution de l'impôt sur le revenu en échange de l'engagement d'effectuer des travaux de rénovation thermique auprès d'un artisan agréé. Le CITE est condamné par UFC comme une « mesure à grand frais qui manque sa cible environnementale ». Des pistes de réforme sont pourtant envisageables selon l'association.

Le bilan : encore bien trop de « passoires thermiques »

Se basant sur une enquête Phébus réalisée en 2013, l'UFC-Que Choisir pointe l'état médiocre et même souvent déplorable du parc des logements français en matière de performance thermique. 14,9 millions de logements, soit environ 54 % des résidences principales en France métropolitaine, affichent des résultats décevants après un diagnostic de performance énergétique, avec une note comprise entre D et E. La situation est même encore plus critique pour une part non négligeable de la population : 8,5 millions de logements, soit environ un tiers du total, sont reléguées au bas de la classification, au niveau des lettres F et G. Avec, bien sûr, d'importantes conséquences sur les factures de chauffage.

Ces 23 millions de logements problématiques (80 % du parc !) constituent logiquement le cœur de cible des efforts entrepris par les pouvoirs publics pour encourager ou subventionner la réalisation de travaux. L'UFC-Que Choisir dénonce le manque d'efficacité et le gaspillage occasionné par le CITE, l'un des dispositifs principaux en la matière.

Le CITE : de quoi s'agit-il ?

Anciennement nommé « crédit d'impôt développement durable » (CIDD), le CITE a été créé en 2005 en vue d'inciter les contribuables à engager des travaux de rénovation thermique de leur habitat, en échange d'une réduction de leur impôt sur le revenu.

Cette niche fiscale, sous sa forme actuelle, est valable jusqu'au 31 décembre 2016. Elle permet de bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 30 % de l'investissement consenti par le ménage (hors main d'œuvre), sous réserve de faire appel pour le chantier à un artisan labellisé RGE et de ne pas dépasser un montant annuel de dépenses égal à 8 000 € pour une personne seule et 16 000 € pour un couple. Soit respectivement une économie d'impôt maximale de 2 400 et 4 800 €.

Les types de travaux et équipements concernés font l'objet d'une liste précise et régulièrement mise à jour. Ils incluent non seulement les matériaux d'isolation thermique mais aussi par exemple les chaudières gaz à condensation ou à micro-cogénération, les fenêtres et volets isolants voire même les bornes de recharge pour véhicules électriques.

Une aubaine (sur)exploitée par certains professionnels

Première critique adressée par UFC-Que Choisir : dans les faits, les euros économisés iraient non pas dans la poche du contribuable, mais bien dans celle de l'artisan… L'association note en effet une corrélation étrange entre les réformes apportées au dispositif, qui ont eu pour effet d'augmenter ou de diminuer la réduction d'impôt maximale, et le montant moyen facturé par les entreprises. Celui-ci a par exemple augmenté de 1 500 € entre 2006 et 2008 et est redescendu de 1 660 € entre 2008 et 2013, au moment où le CIDD a été raboté.

Considérant que l'ampleur et la nature des chantiers n'ont pourtant pas évolué de façon significative sur la même période, l'étude en déduit que les artisans s'appuient sur le crédit d'impôt pour gonfler leurs factures. Un pur effet d'aubaine qui, s'il était démontré, serait particulièrement embarrassant pour les pouvoirs publics.

Un dispositif méconnu, complexe et peu incitatif pour les particuliers

Le CIDD, et son successeur le CITE, ont échoué à entraîner un vaste mouvement de rénovation des logements français. L'UFC observe que la somme totale allouée par les Français pour ces travaux atteint actuellement 12 milliards d'euros par an, montant resté stable par rapport à 2009. Outre sa complexité, le caractère peu incitatif de ce crédit d'impôt peut s'expliquer par deux facteurs principaux :

  • Souffrant des mêmes maux que le reste de la fiscalité française, le CITE a connu pas moins de sept réformes en dix ans d'existence ! Les taux de réduction d'impôt ont régulièrement augmenté ou baissé, et la liste des équipements éligibles connaît de plus un remaniement tous les ans dans la loi de finances. Un manque de lisibilité forcément préjudiciable, et qui ne favorise pas la confiance.
  • L'autre faiblesse du CITE est tout simplement son manque de notoriété. L'association de consommateurs avance qu'à peine un ménage sur deux, avant d'engager les travaux, avait connaissance du dispositif alors même qu'il aurait pu en bénéficier.

Des travaux peu soucieux de la performance énergétique

D'après l'UFC-Que Choisir, le taux indifférencié de 30 % quels que soient les travaux et équipements n'est pas adéquat étant donné que les différents équipements ne se valent pas tous en termes de performance thermique.

Alors que le manque d'isolation des façades et des toitures, par exemple, est responsable à 75 % des pertes de chaleur dans les logements, il n'a pourtant représenté que 34 % du coût du crédit d'impôt en 2013. À l'inverse, les fenêtres représentent 10 à 15 % des pertes mais accumulent à elles seules plus de 40 % des impôts sacrifiés par l'État !

Les pistes de réforme du CITE

Pour mettre fin au pilotage « à l'aveugle » du dispositif par les pouvoirs publics, l'UFC-Que Choisir exhorte les parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat à examiner deux principales pistes de réforme pour le CITE à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances 2016.

L'association propose notamment d'instaurer une progressivité du taux de la réduction d'impôt en fonction de l'amélioration attendue de la performance thermique à la fin des travaux, et, bien sur, de ne plus subventionner indifféremment tous les équipements. À noter que cette solution était déjà plus ou moins celle retenue par l'ancienne version du CIDD, qui proposait des pourcentages différents selon la nature des travaux entrepris.

Par ailleurs, l'étude propose la possibilité de cumuler sans condition, pour des mêmes travaux, le CITE et un éco-prêt à taux zéro. Rappelons qu'à l'heure actuelle, les travaux financés par un éco-prêt peuvent déjà ouvrir droit au CITE, mais seulement si les revenus du contribuable ne dépassent pas un certain seuil pour l'année n-2 (25 000 € pour un célibataire, 35 000 € pour un couple et 7 500 € par enfant). L'idée est donc de supprimer cette condition de ressources.

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