Électricité : la CRE demande une révision urgente du marché

Mis à jour le
minutes de lecture

Récapitulons !

Rappelez-vous, le 4 avril dernier, RTE, le gestionnaire de transport de l'électricité, appelait à une réduction de la consommation. En effet, le froid de ce jour a entraîné un pic de demande qui dépassait alors la production. Dans un communiqué, RTE demandait "aux entreprises et collectivités de modérer leur consommation lundi matin et aux Français qui le peuvent de décaler leur consommation d'électricité au week-end plutôt que lundi en ce qui concerne l'usage d'appareils électroménagers".

Appareils énergivores

Deux choses l'une. Dans l'Union européenne, une grosse partie de l'électricité est produite avec des énergies fossiles. En effet, le gaz représente quasi 20 % de cette production, et le charbon environ 13 %. De fait, toute augmentation appliquée au gaz, au charbon ou au CO2 vient mécaniquement influencer le prix de l'électricité. Ce prix suit donc celui des matières premières, ce que le président qualifiait d'absurde il y a de cela quelques jours..

Autre point, l'électricité ne se stocke pas à ce jour. Son prix sur le marché est déterminé par les coûts de la dernière centrale mise en service pour assurer l'équilibre offre/demande. Bien souvent, il s'agit de centrale gaz ou charbon.

Un prix volatil qui évolue à chaque minute

Chaque jour, une enchère est effectuée par la bourse EPEX (european power exchange) pour l'électricité livrée en France. Cette dernière fixe un prix, appelé prix spot, quotidiennement sur chacune des 24 tranches horaires du lendemain. Les prix sont donc d'autant plus variables en fonction des différents moments de la journée. La fluctuation peut avoir des origines différentes, de la situation climatique à la disponibilité des différents moyens de production.

Plus particulièrement, le 4 avril 2022, un phénomène rarissime s'est produit, entraînant le prix spot à passer de 3000 € à 4000 €/MWh. La CRE cependant revient sur le sujet et explique que cette flambée des prix est due à une addition d'événements défavorables qui ont fait craindre aux principaux acteurs un déséquilibre de l'offre et de la demande.

Toutefois, le réseau a tenu ce jour-là, notamment grâce à la production des énergies vertes, sous-estimée jusque-là.

Des gestes simples qui fonctionnent sur la consommation d'électricité

L'urgence climatique jusque-là n'a pas suffi pour mettre en place un plan d'économie d'énergie. En revanche, un questionnement lourd se fait sur une rupture éventuelle de l'approvisionnement. Si début juin, le président annonçait qu'il "n'y aurait aucune coupure" d'électricité, le gouvernement multiplie aujourd'hui les alertes. Nous pouvions lire dans le Figaro les paroles inquiétantes d'Agnès Pannier-Runacher qui expliquait qu'il "faut se mettre dans le scénario du pire, car il existe". Bruno Le Maire, quant à lui, disait qu'on "ne pourra se chauffer ni se transporter comme si de rien n'était dans quelques mois". Il ajoute que "cette crise peut avoir un impact absolument majeur sur nos vies quotidiennes, sur l'emploi, sur le fonctionnement de nos entreprises et sur l'outil industriel français".

Une situation plus que tendue depuis un an est sur le point de s'aggraver, notamment avec la baisse phénoménale du flux de gaz russe vers l'Europe.

Traditionnellement, la France produit de l'électricité à un prix plus attractif que le reste du continent. Cependant, au vu du manque de disponibilité de son parc nucléaire actuellement, l'inverse se produit.

De fait, certains fournisseurs tout comme le gestionnaire RTE ont fait appel aux gestes citoyens. Ces derniers décalent les pics de consommation et permettent une économie d'énergie évitant la saturation du réseau.

La CRE demande une révision en urgence du relèvement automatique du plafond de l'électricité

En effet, la CRE a publié son rapport d'analyse concernant le pic du prix de l'électricité du 4 avril. Pour le régulateur, il s'agit bien d'un événement exceptionnel. En revanche, aussi particulier soit-il, cet événement a eu un impact fort sur le prix de l'électricité sur le marché. La CRE appelle donc à revoir les règles qui fixent ce plafond, et leur automaticité. A ce jour, la commission revient sur les différents facteurs de ce prix exorbitant :

  • des maintenances sur les lignes frontalières et le manque de disponibilité du parc nucléaire ;
  • la nuit du 4 avril a été la nuit la plus froide enregistrée pour la saison depuis 1947 ;
  • une sous-estimation de la production via les énergies vertes pendant les heures critiques.

Le plafond européen du prix du marché de gros spot a donc été réévalué cette nuit-là. Il a alors pris 1000 €/MWh, le faisant passer de 3000 à 4000 €/MWh.

Ce plafond est automatiquement relevé dans les 24 pays participant au marché de l'énergie si le prix atteint 60 % du plafond dans un pays, et ce pendant une heure. En France, le 4 avril, le prix avait frôlé les 3000 €/MWh entre 8 et 9h du matin. Ce dernier atteignant les 2987,88 €/MWh. Cette réévaluation est due à l'application de la décision de l'Agence de coopération des régulateurs de l'énergie (ACER) en 2017.

La CRE explique donc qu'au vu du cas isolé, le relèvement du plafond n'aurait pas dû avoir lieu. Selon elle, il n'était pas nécessaire au bon fonctionnement du marché de l'électricité européen. Une inquiétude, que ce plafond soit réévalué de manière régulière au cours de l'hiver, ce qui serait préjudiciable pour le consommateur.

La CRE appelle donc "à réviser l'automaticité du relèvement des prix plafonds du marché spot pendant, a minima, le temps de la crise. [Elle demande même] de la suspendre si une révision n'est pas possible en temps utile".