Les solutions de l'Assurance maladie pour le tiers payant généralisé

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Les incertitudes qui pèsent sur la réforme visant à la généralisation du tiers payant restent nombreuses. Une entaille majeure au dispositif tel que prévu initialement découle déjà de la récente décision du Conseil constitutionnel qui n'a validé l'application du tiers payant généralisé que pour la part « sécu » des règlements. Son application pour la part gérée par les complémentaires santé restera donc pour l'instant facultative.

Toutefois, l'obstacle le plus important demeure l'opposition frontale des médecins libéraux. Afin de répondre aux inquiétudes, le directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) Nicolas Revel a présenté ce mercredi 17 février une série de propositions au nom de l'Assurance maladie et de l'ensemble des complémentaires santé. Le but : « apporter des réponses pratiques opérationnelles » aux difficultés soulignées par les professionnels de santé. Les engagements pris suffiront-ils à lever toutes les réticences ?

Pas de centralisation des paiements auprès du régime général…

Un temps évoquée, la piste d'une centralisation des paiements auprès du régime général de l'Assurance maladie avait potentiellement de quoi séduire les professionnels de santé. Dans cette hypothèse, la CPAM aurait remboursé d'office les médecins pour toutes leurs consultations, quelle que soit l'affiliation effective du patient (RSI, MSA…) ou sa mutuelle. L'Assurance maladie se serait ensuite chargée de se retourner vers les organismes compétents.

Le communiqué diffusé mercredi exclut finalement que l'Assurance maladie puisse endosser cette responsabilité. À en croire les organismes signataires, cette décision n'a pas uniquement un motif financier. Elle aurait également été prise en raison de « multiples obstacles juridiques et opérationnels ».

…mais un logiciel ou un intermédiaire pour assister les médecins

Quoiqu'il en soit, les régimes d'assurance maladie ne veulent pas être accusés de ne rien faire pour aider les médecins. Deux mesures, dont l'adoption pourrait être laissée à la libre appréciation de chaque professionnel de santé, sont envisagées :

  1. La mise à disposition d'un « système de suivi automatique des paiements », c'est-à-dire d'un logiciel de facturation spécifiquement conçu pour répondre aux difficultés des médecins, représenterait un gros avantage pratique. Il permettrait de suivre en temps réel, pour chaque consultation ou acte, le processus de facturation et de paiement en faisant par ailleurs le distinguo entre la part sécu et la part complémentaire.
  2. Le recours par le médecin à un prestataire intermédiaire, spécifiquement chargé de la gestion des flux de facturation et du recouvrement auprès des organismes payeurs, pourrait être simplifié à l'instar de ce qui existe déjà pour les pharmaciens. S'ils le souhaitent, ces derniers peuvent se décharger du suivi de leurs remboursements auprès d'un « organisme concentrateur tiers » qu'ils rémunèrent. Le médecin serait libre de solliciter ou pas un tel intermédiaire, mais aussi de choisir le niveau de prestation qu'il souhaite (par exemple ne recevoir qu'un paiement unique sécu+mutuelle pour chaque consultation).

Des engagements sur les délais de paiement

La question des retards, des erreurs ou des absences de remboursement de la part des caisses d'assurance maladie est l'une de celles qui inquiètent le plus les médecins. Conformément à la feuille de route tracée par la ministre de la Santé Marisol Touraine, les organismes d'assurance maladie s'engagent collectivement sur un délai de paiement court.

Si aucun délai précis n'est pour l'instant évoqué, les complémentaires santé ont accepté de respecter « des délais au moins identiques » à ceux qui seront prochainement imposés à l'Assurance maladie par décret. S'il s'en tient aux engagements du gouvernement, ce décret devrait fixer un paiement « sous sept jours maximum ». À défaut les signataires acceptent le principe de pénalités financières.

Vers un contrôle automatisé des attestations

Les rejets de facturation représenteraient actuellement 2 à 4 % de l'ensemble des consultations médicales. Dans leur écrasante majorité, ils seraient dus à un non-respect du parcours de soins coordonné ou à une carte vitale non mise à jour. À compter de la mise en place du tiers payant, les caisses s'engagent à payer la part sécu au médecin en toutes circonstances, même lorsque l'une de ces deux hypothèses se présente. À priori le médecin n'aura donc plus besoin de perdre un temps précieux à vérifier les droits de son patient.

La part remboursable par la complémentaire santé nécessitera encore le contrôle de l'attestation par le praticien, mais peut-être plus pour très longtemps. Un « service en ligne intégré » commun à tous les organismes pourrait voir le jour d'ici 2017 afin de permettre un contrôle centralisé et instantané des droits des patients.

Les médecins maintiennent leur opposition

Condamnant autant les modalités pratiques du tiers payant généralisé que la philosophie même de cette réforme, les médecins y restent sans surprise opposés malgré les concessions accordées par l'Assurance maladie.

Le premier syndicat des médecins généralistes, MG, voit même dans le rapport commun des régimes obligatoires et complémentaires la confirmation « que le tiers payant généralisé n'aura pas lieu ».