
Mise à jour au 02 octobre 2014 : Stéphane Richard, P-DG d'Orange, annonce l'arrivée de Netflix sur les box de ses abonnés pour le mois de novembre, devenant par ce biais le second FAI, après Bouygues Telecom, à proposer ce service de SVoD à ses clients en France.
Mise à jour au 08 octobre 2014 : SFR a finalement décidé d'accélérer la cadence et double ses concurrents directs Bouygues comme Orange en proposant à ses abonnés Red+Box qui disposent de son décodeur TV sous Android le service de SVoD Netflix. Ne cherchez là aucune coïncidence fortuite. L'annonce faite par Bouygues intervient le jour même où Netflix lance en France son service de location de vidéo par abonnement.
« L'expérience Netflix » débarque dans l'Hexagone
Aussi bien attendue qu'abondamment commentée depuis déjà quelques semaines, l'offre SVoD du géant américain Netflix est disponible depuis lundi minuit, pour un montant allant de 7,99 euros à 11,99 euros par mois. Ce vidéoclub, lequel a fait des ravages sur son passage outre-Manche, parviendra-t-il à conquérir dans l'Hexagone les importantes parts de marché que beaucoup lui prédisent ?
Pour en juger, revenons tout d'abord sur les principaux points forts de cette offre, qui ont bâti son succès et ont permis à Netflix d'engranger en quelques années d'existence seulement un peu plus de 50 millions d'abonnés disséminés dans une quarantaine de pays. Netflix, c'est avant tout et surtout la possibilité d'accéder à un service de vidéo à la demande (séries, films, documentaires) qui s'appuie sur un fonctionnement réputé en termes d'expérience-utilisateur.
D'une part, tous les contenus du catalogue offert en location par la firme sont accessibles via n'importe quel support, de l'inévitable téléviseur en passant par le PC, la tablette, le smartphone mais encore la PS3, la Wii, la Xbox… Autrement dit, Netflix permet à son utilisateur de débuter un programme depuis son ordinateur par exemple puis de le reprendre plus tard sur sa tablette, simplement grâce au compte utilisateur gardant en mémoire son historique de consommation.
D'autre part, le géant de la SVoD est particulièrement connu et apprécié pour son moteur de recommandation, dont la qualité de l'algorithme à l'œuvre permet de placer la personnalisation des goûts de chacun au cœur de l'expérience-utilisateur. Ce système de recommandation automatique, associé à une interface pratique et réussie rend « l'expérience Netflix » particulièrement efficace.

Le catalogue Netflix : un moteur vidé de son carburant
Venons-en à présent à la principale limite propre à cette offre : son catalogue. Paradoxalement, ce qui aurait dû constituer une réelle incitation à la souscription se révèle au final un frein pour un abonné friand de nouveautés. Ne cherchez pas les dernières saisons de séries vedettes à louer par le biais de Netflix, qui ne propose rien de révolutionnaire ou même de franchement tranchant en termes de contenu par rapport à ses concurrents.
Bien entendu, on reverra avec plaisir beaucoup de « vieilleries » comme Gossip Girl, Prison Break ou encore l'intégrale de How I met your mother. Bien sûr, on visionnera avec une curiosité non feinte certains contenus maison, à l'image d'Orange is the new black ou encore Hemlock Grove.
Mais nombre de séries parmi les plus attendues et les plus suivies, telle « House of Cards », ne sont pas proposées à la location. Véritable ironie du sort, quand on sait que celle-ci est elle-même produite par… Netflix, mais distribuée en France par Canal+, concurrent direct de la firme américaine qui en a acquis les droits de retransmission pour son propre parc d'abonnés TV. Cherchez l'erreur !
D'autres critiques à l'encontre du géant de la SVoD pourraient tout aussi bien être adressées à ses concurrents. C'est le cas de l'accès à une filmographie récente : Netflix doit ainsi composer avec la très décriée « chronologie des médias », règle qui impose de respecter un délai de 3 ans séparant la sortie en salle d'un film de sa mise en location par le biais d'une plate-forme de vidéo sur abonnement. Règle « très décriée » car directement synonyme d'encouragement au piratage aux yeux de ses détracteurs.
Dernière limite d'ordre technique enfin, laquelle n'est pas, là encore, du seul apanage de Netflix : la vitesse de votre connexion Internet. Avant de vous engager et afin d'éviter toute mauvaise surprise, pensez à vérifier l'étendue de votre bande-passante et comptez sur une connexion haut-débit 2 Mbits/s pour visionner votre contenu en qualité standard, voire 5 Mbits/s pour pouvoir en profiter en qualité HD.
Quand le soldat Bouygues décide de rompre les rangs
Rappelons enfin que l'offre Netflix n'est pas disponible sur les télévisions équipées de box. À l'exception de celles possédées par les abonnés Bouygues Telecom. Et c'est bien là une nouveauté de taille dans le paysage de la SVoD français. Alors que l'ensemble des opérateurs avaient pour l'heure adressé une fin de non-recevoir à la firme américaine, l'on a appris tôt dans la matinée de lundi que la filiale du groupe diversifié Bouygues rompait l'union sacrée qui prévalait jusqu'alors.
Par le biais d'un communiqué, Olivier Roussat, P-DG de Bouygues Telecom, s'est dit particulièrement fier et heureux « d'annoncer la signature d'[un] partenariat avec le leader mondial de la SVoD ». Disponible dès novembre pour les clients de son offre Bbox Sensation tout comme pour les futurs abonnés à sa box Android, Bouygues a donc décidé de griller la politesse à ses concurrents et donne un nouveau gage de sa volonté de poursuivre sa « guerre dans l'Internet fixe », selon l'exacte formule employée par Martin Bouygues en personne.
Jusqu'à présent, un accord tacite prévalait entre fournisseurs d'accès à Internet français : ces derniers n'étaient pas hostiles à l'idée d'accueillir Netflix, mais l'intégration de l'offre en SVoD du géant américain buttait sur des considérations financières. Autrement dit, se posait la question d'une participation financière de la firme au financement des infrastructures, à l'instar de Canal +, exemple de chaîne ayant noué un accord financier auprès de certains opérateurs télécoms en vue de sa diffusion.
À cette première réserve s'ajoutait une seconde pierre d'achoppement : l'insertion de Netflix au sein de l'écosystème français en matière de création audiovisuelle et de contenus français. Si les détails de l'accord financier passé entre Bouygues et Netflix n'ont pas été dévoilés, on en sait un peu plus en revanche sur ce second point : en pleine campagne de promotion de son offre, Reed Hastings, P-DG de Netflix, s'est voulu rassurant, promettant de « produire davantage de séries françaises », telle la série « Marseille » dont il a annoncé le prochain tournage.
Mise sous pression, la concurrence française s'organise
De leur côté, et en prévision de la déferlante Netflix, les acteurs de la SVoD ne sont pas restés de marbre. Qu'il s'agisse du groupe Canal+, d'Orange via sa filiale OCS, de Numericable ou d'autres concurrents encore, tous ont eu en commun le souci d'adapter leurs offres en vue de ne pas subir la tempête annoncée. Avec, pour chacun d'entre eux, plus ou moins de succès à l'arrivée.

CanalPlay, le Netflix français
Figurant parmi les principaux acteurs de la SVoD en France, le groupe de la chaîne cryptée a récemment amorcé une modernisation tout comme un renforcement de son offre, laquelle a déjà été souscrite par près de 520 000 abonnés en 3 ans seulement, selon des chiffres avancés par le Huffington Post. Les principales innovations annoncées en ce sens par CanalPlay semblent s'inspirer en majeure partie des points forts mis en avant par Netflix : ajout d'un moteur de recherche personnalisée se basant sur les préférences passées de l'abonné, système de suggestion et production de quelques séries originales.
Du côté du contenu, CanalPlay s'appuie sur un catalogue riche de près de 10 000 contenus – plus de 120 séries réparties en 4 000 épisodes en tout – et quelques 2 000 films, des documentaires, etc. En revanche, rien ou presque à se mettre sous la dent en termes de contenu exclusif, pour un prix à l'abonnement – 9,99 €/mois – quasi-identique à celui de Netflix. Point fort à souligner tout de même : CanalPlay est disponible sur la box de tous les opérateurs, ce qui n'est pas le cas de Netflix, loin s'en faut.

OCS : de l'HBO, tout l'HBO et… rien que de l'HBO
On pourrait facilement dire de l'offre proposée par la filiale d'Orange que celle-ci a les défauts de ses qualités. Autrement dit, OCS, qui s'est spécialisée dans l'achat et la retransmission de séries exclusives griffées HBO, fera le bonheur des amateurs du genre. De Game of Thrones à True Detective en passant par The Walking Dead, The Newsroom, OCS est l'abonnement à souscrire pour qui veut retrouver en intégralité un catalogue HBO particulièrement étoffé.
Au risque de se lasser ? Car en faisant l'impasse sur ce type de contenu exclusif, le reste du catalogue est particulièrement pauvre. Pour un coût à l'achat, rappelons-le, plus élevé que Netflix : comptez une douzaine d'euros environ chaque mois. Là encore, l'hyper-spécialisation de la chaîne est un pari qui s'apprécie en fonction des goûts de chacun : véritable must pour certains, overdose pour d'autres.
Particularité notable du service OCS à relever : contrairement à Netflix, qui permet une diffusion permanente du contenu, les programmes stockés sur OCS ne sont accessibles que pour une durée limitée à 30 jours. À nouveau, tout est affaire de préférence en termes de gestion d'une bibliothèque numérique.
Erratum : la série The Walking Dead, bien que diffusée par OCS, n'est pas une série HBO comme malencontreusement indiqué à la parution de la première version de ce guide. Merci à nos lecteurs pour leur vigilance.

Vodkaster : un modèle hybride et unique
Pour juger de l'étendue réelle de l'offre de Vodkaster, il s'agit tout d'abord d'en décrypter le principe – atypique – de fonctionnement. À sa première visite, l'abonné est incité à adresser gratuitement à Vodkaster sa collection de DVD, que la plate-forme se charge de numériser et qui demeure à vie accessible par ce dernier sur son espace privé. Par la suite, la plate-forme lui propose de revendre à n'importe quel autre utilisateur du site la version numérisée de ses DVD.
Le vendeur en fixe librement le prix, dans le respect d'une fourchette basse de 1,99 € minimum dont 0,99 € de commission pour Vodkaster, la seule source de revenus de ce dernier par ailleurs. Le plus gros avantage du service ? Très certainement l'accès à un contenu pléthorique, mais également et surtout très récent : quatre mois seulement après sa projection en salles et sa commercialisation en DVD, tout film est susceptible de se retrouver à l'achat sur Vodkaster. On est là loin, très loin des fameux 36 mois d'attente incompressible propre à Netflix, quand bien même on ne parle plus exactement de la même chose.

LaBox Séries : service minimum chez Numericable
En réponse à l'arrivée de Netflix en France, Numericable n'est pas en reste. Le câblo-opérateur a ainsi choisi le jour du lancement en fanfare de Netflix pour dévoiler sa riposte : LaBox Séries. Monnayant un abonnement à la fibre optique - LaBox Fibre -, les abonnés à Numericable bénéficient d'un accès gratuit à un catalogue de séries TV. Toutefois, ne cherchez là aucune réelle innovation dans cette nouvelle offre proposée par la filiale d'Altice à ses clients.
LaBox Séries n'est d'ailleurs pas tant un concurrent à Netflix qu'une interface - ceci dit, au design particulièrement réussi - agrégeant l'ensemble des séries disponibles sur les diverses boutiques VoD et Replay des chaînes. Peu de chance que cette riposte timide puisse inquiéter le géant américain de la SVoD, d'autant que nombre d'épisodes de séries parmi les plus recherchées sont payables à l'acte.

Les autres acteurs classiques de la VoD
Le petit monde de la VoD ne se limite bien évidemment pas aux seuls acteurs précités. Cependant, les autres fournisseurs semblent condamnés à jouer les rôles de second couteau. Qu'il s'agisse d'iTunes, de SFR ou encore de MyTF1, les tarifs à l'unité des produits présents à leur catalogue rendent le coût de la location de contenu particulièrement prohibitif. Pour finir, on voit mal VideoFutur, qui s'est récemment associé à FilmoTV, faire contre-poids aux géants du secteur, et ce notamment à cause d'un catalogue manquant tant de fraîcheur que de profondeur.
Crédits Photos : Netflix, CanalPlay, OCS, Vodkaster, Numericable, VideoFutur