Acteurs de l'énergie : le médiateur pointe les bons - et mauvais - élèves

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Le bilan annuel du médiateur de l'énergie constitue toujours une bonne opportunité de faire le point sur les relations entre les foyers français et leurs fournisseurs et distributeurs d'énergie. Chargé depuis sa création en 2007 de résoudre un maximum de litiges à l'amiable pour éviter le recours aux tribunaux, le médiateur se montre dans l'ensemble assez satisfait de l'année 2015, avec une diminution globale du nombre de litiges recensés…

Ce qui n'empêche pas l'autorité indépendante de distribuer quelques cartons rouges, dont notamment un rappel à l'ordre assez sévère à l'attention d'Enedis (anciennement ERDF) en raison de ses « mauvaises pratiques » !

La filiale d'EDF, en charge de 95 % du réseau de distribution français, ferait preuve parfois et selon le médiateur d'une coupable légèreté vis-à-vis de ses obligations de service public, sur des sujets pourtant sensibles comme les frais de raccordement ou l'indemnisation des surtensions accidentelles.

Moins de litiges en 2015, et un médiateur plus réactif

La saisine des services du médiateur de l'énergie a porté sur un total de 12 319 litiges en 2015, soit 15 % de moins par rapport à 2014.

Évolution du nombre de litiges reçus
Évolution annuelle du nombre de litiges reçus. Source : rapport annuel du MNE

Le médiateur, Jean Gaubert, y voit le résultat du « travail mené auprès des opérateurs en lien avec les pouvoirs publics » pour résorber les litiges les plus fréquents, et notamment ceux liés aux surfacturations – souvent suite à une mauvaise estimation initiale de la consommation du foyer par le fournisseur. La « douceur de l'hiver 2014-2015 » est également un facteur à prendre en compte, puisque ce phénomène climatique a diminué le montant moyen des factures d'énergie et a entraîné mécaniquement une baisse du nombre de facture d'énergie impayées en 2015.

Typologie des litiges reçus
Typologie des litiges reçus par le médiateur. Source : rapport annuel du MNE

Malgré ce contexte, le nombre de recommandations émises par le médiateur a connu une forte poussée (2 910 au total, soit +27 %). Un paradoxe qui s'explique par le rattrapage d'un retard dans l'étude de certains dossiers de la fin 2014, et qui témoigne donc d'une belle réduction des délais de traitement.

Enedis pointé pour ses mauvaises pratiques

Les temps sont durs pour Enedis, ex-ERDF : alors même que le distributeur doit affronter la polémique liée au coût annoncé de son changement de nom ou encore les actions de plus en plus virulentes des opposants au compteur Linky, le contenu du dernier bilan du médiateur de l'énergie est potentiellement explosif pour l'entreprise. Enedis représente en effet une large part des dossiers portés devant le médiateur, très souvent pour des « litiges complexes, avec des enjeux financiers non négligeables » qui peuvent se chiffrer en dizaines de milliers d'euros. Parmi les « mauvaises pratiques » récurrentes figurent, entre autres :

  • Des raccordements en électricité effectués de façon très tardive, entraînant des délais préjudiciables sur les chantiers, et un mode de facturation de ce service jugé « incompréhensible » par le médiateur.
  • La facturation de services censés être gratuits, dont notamment des interventions sur le réseau abusivement facturées aux propriétaires voisins.
  • Le refus d'intervenir sur les câbles des colonnes montantes dans les immeubles en copropriété, alors que ces éléments font partie intégrante du réseau de distribution aux yeux du médiateur et que 300 000 d'entre elles seraient en très mauvais état, entraînant un risque d'« accidents graves ».
  • Un service clientèle peu réactif et peu coopératif. Un particulier, en 2014, a ainsi dû contester un premier refus et attendre plusieurs mois avant d'obtenir enfin un contrôle métrologique de son compteur, dont il soupçonnait le dysfonctionnement, bien que ce droit lui soit expressément reconnu dans son contrat. Bien lui en a pris puisque le contrôle a révélé une surestimation de 25 % de sa consommation !
  • Une tendance à fuir ses responsabilités sur certains dossiers épineux, dont les dégâts causés par des surtensions accidentelles. Y compris lorsque le médiateur a donné raison au consommateur, ce qui oblige alors ce dernier à saisir les tribunaux pour obtenir gain de cause.

Un nombre de litiges en hausse chez les fournisseurs alternatifs

Enedis n'est pas le seul à subir les foudres du médiateur. Ce dernier pointe aussi des dysfonctionnements de plus en plus sensibles du service proposé par certains fournisseurs alternatifs, qui ont du mal à faire évoluer leurs structures pour accommoder une clientèle grandissante.

Litiges par fournisseurs
Pourcentage de litiges par fournisseur d'énergie. Source : rapport annuel du MNE

Impliquant des clients résidentiels, les litiges avec son fournisseur d'énergie, rapportés à une base de 100 000 contrats en électricité ou gaz naturel, sont au nombre de 308 chez ENI. Le fournisseur italien est cette année la lanterne rouge du secteur, même si le médiateur reconnaît que des efforts ont été engagés et commencent à porter leurs fruits. Lampiris arrive derrière, avec 199 litiges pour 100 000 contrats : visiblement victime de son succès, le fournisseur alternatif a connu un important afflux de clientèle après avoir été recommandé par l'UFC-Que Choisir pour deux années consécutives.

Malgré sa croissance rapide, Direct Energie maintient quant à lui un taux acceptable de 82 litiges pour 100 000 contrats. EDF et Engie, de leur côté, sont les meilleurs élèves et continuent à faire baisser le nombre de litiges (respectivement 29 et 47 pour 100 000 contrats).