Xavier Niel : le « Monsieur Non » des télécoms français ?
En effet, et alors même que ses concurrents s'engageaient dans une surenchère d'annonces concernant Netflix, la 4G ou encore les nouvelles générations de box, la firme de Xavier Niel restait bien silencieuse et laissait planer un doute sur ses intentions.
Plusieurs déclarations récentes des dirigeants d'Iliad viennent finalement préciser la stratégie du groupe à moyen terme et clore par la négative quelques débats : Free n'intègrera ainsi ni Netflix, ni Android dans ses box, et renonce par ailleurs à son grand projet de rachat de l'américain T-Mobile.
Xavier Niel, le nouveau « Monsieur Non » des télécoms français ?
Non à l'intégration de Netflix (pour l'instant)
Se positionnant résolument à contre-courant de tous les autres opérateurs, Free a décidé de « ne pas se coucher tout de suite devant Netflix ». Tels sont du moins les propos tenus ce 9 octobre par le P-DG, Maxime Lombardini, à l'occasion d'un colloque organisé par le régulateur des télécoms, l'ARCEP.
La raison tient à ce que Free, sur le marché de l'Internet fixe, tire une bonne partie de ses marges financières de la distribution de chaînes payantes et de vidéos à la demande, notamment via CanalPlay. À l'inverse d'Orange, SFR et Bouygues, qui ont tous annoncé l'intégration de Netflix dans leurs box pour novembre au plus tard, Free joue donc la carte de l'attentisme et ne s'interdit pas de se joindre au mouvement si le géant américain rencontre, effectivement, le succès escompté auprès des Français.
Non à une box Android
Concernant la nouvelle génération de box Internet reposant sur un système d'exploitation Android, Free choisit également une autre voie que celle récemment empruntée par Bouygues Telecom et SFR. L'utilisation d'un système ouvert et conçu gratuitement par des développeurs extérieurs présente certes des arguments en termes de réduction des coûts, mais Maxime Lombardini estime qu'un tel choix reviendrait à « laisser les clés à Google ».
De fait, le risque est que le géant américain referme progressivement son système pour en rendre les utilisateurs captifs, ou l'utilise à son profit pour pousser ses propres contenus. Une perspective qui, là encore, effraie le groupe Iliad, lequel compte beaucoup sur ses propres offres payantes pour prospérer. Il semble donc vain d'espérer une évolution de ce type pour la prochaine box de Free.
Non au rachat de T-Mobile US
La dernière annonce d'envergure, à l'inverse des deux autres, s'impose à Free et constitue un revers pour la stratégie du groupe Iliad : après des semaines de tractations, le conseil d'administration de l'opérateur américain T-Mobile a rejeté une ultime offre de rachat ce lundi 13 octobre. Rappelons qu'Iliad convoitait le rachat de cet acteur important, détenu à 66 % par Deutsche Telekom.
Une première offre, déposée cet été, mettait 15 milliards de dollars sur la table pour acquérir au total 56,6 % du capital. Iliad renchérissait ensuite en proposant 18 milliards de dollars, pour 67 % du capital. Les discussions semblent toutefois avoir achoppé sur la valorisation des parts rachetées, puisque Free proposait 33 $ par action alors que Deutsche Telekom en voulait au moins 35. Il est possible aussi, toutefois, que le groupe allemand n'ait en réalité plus envie de se débarrasser de sa filiale américaine, annoncée en pleine croissance, et de perdre par la même occasion une bonne part de sa capitalisation boursière.
Bientôt oui au rachat de Bouygues Telecom ?
C'est un euphémisme de dire que le rachat de T-Mobile US suscitait le scepticisme des investisseurs : depuis cette annonce, l'action d'Iliad avait ainsi perdu environ 25 % de sa valeur à la bourse de Paris ! À l'abandon officiel du projet, le soulagement des actionnaires et le rebond ne se sont pas fait attendre puisque l'action Iliad reprenait 12 % sur la seule journée du mardi 14 octobre.
On notera avec intérêt que l'action de Bouygues Telecom, dans le même temps, était valorisée de près de 5 % à la hausse. Rien d'étonnant si l'on considère que la fin de l'aventure américaine de Free pourrait relancer la fameuse concentration du marché français des télécoms.
Rien n'est encore certain pour autant : Xavier Niel se plaît pour l'instant à affecter une certaine indifférence quant à la possibilité d'un rachat de Bouygues Telecom, et précisait récemment apprécier la forte concurrence permise par l'existence de quatre grands acteurs. Bouygues Telecom, de son côté, ne s'annonce pas vaincu, multiplie les offres commerciales agressives sur la 4G et compte sur une mutualisation des coûts d'entretien du réseau avec SFR-Numericable pour réduire ses charges. Ultime obstacle : Xavier Niel et Martin Bouygues semblent nourrir, plus que jamais, une vraie détestation mutuelle !
Crédits : Thomas Samson/AFP