La clause bénéficiaire d'une assurance-vie

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Même si vous êtes jeune et considérez votre assurance-vie comme un pur produit d'épargne, il convient de prêter une attention toute particulière à la rédaction de la clause bénéficiaire, qui désigne la ou les personnes qui hériteront du capital en cas de décès.À défaut d'un choix exprimé avec clarté, l'épargne précieusement accumulée tombera en déshérence, et finalement… dans l'escarcelle de l'État au bout de trente ans.

Clause bénéficiaire : une définition

La « clause bénéficiaire » est obligatoirement présente dans tout contrat d'assurance-vie.

Comme son nom l'indique, elle doit désigner le « bénéficiaire » du contrat, c'est-à-dire la personne physique ou morale à laquelle les fonds seront transmis en cas de décès du titulaire du contrat.

Dans le cas d'une personne morale, par exemple une association, il est impératif de la désigner formellement, en indiquant au besoin sigle, dénomination complète et adresse du siège social.

À noter que pour être recevable, cette personne morale doit être habilitée à recevoir dons comme legs.

Les grands assureurs disposent tous de services spécialisés dans la recherche des bénéficiaires.

Dans le meilleur des cas, l'assureur est rapidement avisé du décès de son client. Il prend contact directement avec les personnes concernées dans un délai de quinze jours.

Puis il dispose d'un délai supplémentaire d'un mois (à compter de la réception des pièces justificatives envoyées par le bénéficiaire) pour effectuer le virement de la somme.

L'assureur pourra également passer par l'intermédiaire du notaire chargé de la succession, ou utiliser de nombreux moyens d'enquête mis à sa disposition par la loi.

Lorsque la clause bénéficiaire est inexistante ou caduque, le risque est que le capital investi dans le contrat d'assurance-vie tombe en déshérence.

Rédaction de la clause : de l'art de se montrer précis…

D'un point de vue formel, la clause bénéficiaire est souvent proposée par l'assureur sous une formulation générique, du type « le conjoint au moment du décès, à défaut les enfants nés ou à naître, à défaut les héritiers ».

La personne citée en premier est considérée comme le bénéficiaire de premier rang et, sauf mention contraire, recevra l'intégralité des fonds si elle est vivante au moment de la transmission.

Les personnes citées à la suite de la mention « à défaut » sont des bénéficiaires de second rang, de troisième rang et ainsi de suite : ils ne seront touchés qu'en cas de décès du bénéficiaire prioritaire.

Il est évident que le souscripteur n'est pas contraint d'accepter la clause en l'état, et qu'il reste libre de l'adapter à sa situation personnelle, par exemple s'il n'est pas marié mais pacsé, ou encore s'il n'a pas d'enfants et est certain de ne pas en avoir.

Rédigée en concertation avec l'assureur au moment de l'ouverture du contrat, la clause bénéficiaire peut ensuite être réactualisée et modifiée aussi souvent que nécessaire par le client de son vivant.

Cette possibilité est notamment précieuse pour éviter les risques de caducité, par exemple dans l'hypothèse où la personne désignée décède avant le souscripteur lui-même.

Dans ce cas, l'assuré peut choisir de réactualiser la clause, ou de la laisser en l'état pour favoriser les bénéficiaires de second rang.

…sans tomber dans l'excès

Il est possible de désigner nominativement un bénéficiaire, bien que cela ne soit pas recommandé (un conjoint peut changer).

Dans ce cas il conviendra de fournir un état civil complet, soit les nom, prénom, lieu et date de naissance, afin d'éviter toute confusion liée à une homonymie.

Le souscripteur, s'il le souhaite, peut également désigner plusieurs bénéficiaires de premier rang, en se montrant précis sur la part - aussi appelée « quote-part » - qui revient à chacun.

Dans ce cas, il convient de s'exprimer en pourcentages (50/50, 70/30…) et non en montants bruts, la valeur de liquidation d'un contrat étant naturellement amenée à évoluer avec le temps.

Certains assurés souhaitent ajouter à la clause bénéficiaire une « charge », c'est-à-dire une condition à respecter de la part du bénéficiaire pour toucher la somme, comme par exemple l'entretien de la tombe du défunt ou le financement des études d'un petit-fils.

L'assureur n'ayant pas les moyens (ou le rôle) de contrôler l'utilisation des fonds versés, ce type de disposition ne présente que peu d'intérêt.

Exemples de clauses bénéficiaires

Le bénéficiaire de votre choix doit être désigné par sa qualité ou bien par son nom.

  • À votre conjoint : « mon conjoint, non séparé de corps »
  • À votre partenaire de PACS : « mon partenaire avec lequel j'ai conclu un pacte civil de solidarité »
  • À votre concubin : « Monsieur/Madame (nom) (prénom), né(e) le (date de naissance) à (lieu de naissance) »
  • À vos enfants comme à vos petits-enfants ou arrière petits-enfants, en remplacement de leurs parents décédés : « mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représentés par parts égales »

Dans tous les cas, insérez systématiquement à la fin de votre clause la formule « à défaut à mes héritiers » afin de prévenir tout risque d'absence de bénéficiaire.

Bon à savoir

Certaines personnes, de par leur statut, fonction ou influence qu'elles sont susceptibles d'excercer auprès du donateur, ne peuvent prétendre recevoir legs comme donation.

La loi interdit ainsi de désigner en qualité de bénéficiaire les medecins, pharmaciens, auxiliaires médicaux ayant dispensé des soins au titulaire du contrat pendant la maladie dont elle meurt.

Il en est de même des personnels d'établissements sociaux et médico-sociaux s'occupant du titulaire de l'assurance-vie, mais également des employés de maison de retraite, des accueillants familiaux, des ministres du culte, de l'assureur ou conseiller clientèle...

En revanche, la loi n'interdit pas les donations réalisées en faveur d'une aide ménagère.

La désignation chez le notaire : une solution très pratique

Pour ne jamais avoir à modifier la clause du contrat, il suffit de la rédiger en indiquant que le nom du bénéficiaire est mentionné dans un acte déposé auprès de l'étude d'un notaire nommément désigné.

Cela permet à l'assuré de modifier ses dispositions en toute discrétion et quand bon lui semble.

Le notaire, par ailleurs, pourra être utilement chargé du reste de la succession et fera le nécessaire auprès de l'assureur en cas de carence de ce dernier : aucun risque, dans ce cas, que le contrat tombe en déshérence.

L'acceptation de la clause bénéficiaire

La loi offre au bénéficiaire la possibilité d' « accepter » le contrat avant même le décès de l'assuré.

Cela nécessite, depuis le 19 décembre 2007, la signature d'un avenant tripartite entre l'assuré, l'assureur et le bénéficiaire, et donne ensuite à ce dernier un certain pouvoir : il pourra notamment s'opposer à ce que l'assuré effectue un rachat total ou partiel de son contrat.

À noter qu'avant cette date, le bénéficiaire avait la faculté d'accepter le contrat de façon totalement unilatérale, en adressant un courrier recommandé avec accusé de réception à l'attention de l'assureur. L'assuré, de ce fait, pouvait être pris au dépourvu.

C'est la raison pour laquelle il était, jusqu'à une période récente, fortement déconseillé de prévenir un proche de l'existence d'un contrat. Aujourd'hui, cette précaution n'est plus pertinente.

À l'opposé, une personne peut librement renoncer au contrat d'assurance-vie dont elle est la bénéficiaire.

Le cas se présente par exemple si le conjoint du défunt, bénéficiaire prioritaire, souhaite que la somme passe directement aux enfants du couple, désignés comme bénéficiaires de second rang.

Quel sort pour les contrats en déshérence ?

Au cours des dernières années, l'arsenal législatif a été progressivement renforcé afin d'inciter les assureurs les plus récalcitrants à entreprendre des démarches réelles et sérieuses pour retrouver les bénéficiaires des contrats en déshérence.

De fait, et malgré les premiers efforts entrepris, la Cour des comptes estimait encore en 2013 les sommes en jeu à près de 4 milliards d'euros !

Rappelons tout d'abord que n'importe quel particulier, depuis la loi du 15 décembre 2005, peut désormais s'enquérir librement de l'existence d'un contrat dont il serait le bénéficiaire.

Bon à savoir

La rédaction d'une clause bénéficiaire d'un contrat d'assurance-décès répond point par point à la même logique que celle s'appliquant à une assurance-vie.

Il doit pour cela adresser un courrier à l'Association pour la Gestion des Informations sur le Risque en Assurance (AGIRA), dont le rôle est de centraliser les données relatives à tous les contrats d'assurance-vie souscrits en France.

Ce premier dispositif AGIRA, fragile puisqu'il se fonde sur l'initiative des bénéficiaires, a été renforcé en 2009 par un dispositif « AGIRA 2 ».

Ce dernier donne à l'association le droit de comparer ses propres données avec le répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP), tenu par l'Insee. Le répertoire recense notamment tous les décès qui surviennent en France.

Depuis le 1er janvier 2015, les assureurs peuvent même interroger l'administration fiscale pour obtenir les coordonnées d'un contribuable.

Diverses mesures viennent compléter l'ensemble, dont l'impossibilité pour les assureurs de facturer les frais de recherche du bénéficiaire.

Dans une position en date du 13 février 2014, l' ACPR rappelle en effet qu'un assureur ne peut pas prélever sur le montant du capital à transmettre le coût des recherches des bénéficiaires, quand bien même cette imputation serait prévue dans les clauses du contrat.

De même, depuis 2006, interdiction est faite à l'assureur de réintégrer les capitaux non réclamés dans ses bénéfices.

Ces sommes sont désormais confiées en gestion à la Caisse des Dépôts et Consignations au bout de dix ans (mesure applicable à compter du 1er janvier 2016), puis intégrées dans le budget de l'État au bout de trente ans.