Bientôt jugés sur vos amis Facebook pour l’obtention d’un prêt immobilier ?

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S'il est bien connu que Facebook collecte les données personnelles de ses utilisateurs et devient peu à peu un véritable outil d'analyse trouvant des applications dans des domaines aussi divers que la publicité, le marketing et la sociologie, le groupe ne compte pas s'arrêter en si bon chemin et continue de rechercher de nouvelles utilisations pour ses données.

Le géant des réseaux sociaux a ainsi récemment breveté une méthode d'authentification en ligne qui pourrait, par exemple, permettre aux organismes de crédit immobilier de se faire une idée sur la solvabilité de leurs clients potentiels à partir de l'analyse de leur réseau social. Ce brevet relance le débat : jusqu'où pourront être utilisées les informations personnelles collectées par les réseaux sociaux ?

Une méthode d'autorisation en ligne aux applications controversées

Le brevet déposé par Facebook, dont le titre peut être traduit par « Autorisation et authentification basées sur le réseau social d'un individu », propose une méthode basée, comme son nom l'indique, sur l'examen du réseau social d'un individu.

Visant à simplifier les processus de contrôle « parfois inutilement restrictifs » des fournisseurs de contenu ou de service sur Internet, cette méthode pourra s'appliquer à la fois à l'autorisation d'envoi d'informations vers un individu et à l'authentification préalable à l'accès à un contenu ou un service.

Afin de clarifier son propos, le brevet développe plusieurs exemples d'applications de cette « invention », dont l'un connait un écho particulièrement retentissant : l'utilisation des données collectées par les réseaux sociaux pour déterminer si oui ou non un individu est suffisamment fiable pour accéder à un prêt !

Ce que votre réseau Facebook dit au sujet de votre solvabilité

Dans ce cas de figure, le fournisseur de service est votre créancier potentiel. Lors de votre demande de crédit en ligne, des informations telles que votre adresse e-mail vous seront demandées et, selon le brevet déposé par la firme de Mark Zuckerberg, l'organisme de prêt pourra faire une requête auprès de la base de données de votre réseau social afin d'obtenir les informations relatives à votre compte : le nombre et l'identité de vos amis, mais aussi des amis de vos amis, des amis des amis de vos amis…

La « côte de solvabilité » de l'ensemble de votre réseau social sera alors examinée afin de calculer une valeur moyenne. Si cette valeur moyenne est suffisante, vous pourrez être authentifié et poursuivre le processus de demande de prêt en ligne... mais dans le cas contraire, votre demande sera tout simplement rejetée !

En résumé, si votre réseau social compte un nombre élevé de mauvais payeurs, il en sera déduit qu'il y a de fortes chances que vous présentiez des risques d'avoir le même comportement.

Une révolution du secteur bancaire loin d'être inédite outre-Atlantique...

À priori, avant d'accorder un prêt, les banques vérifient l'historique financier du demandeur (relevés de comptes, antécédents en matière de crédit) afin de s'assurer de sa solvabilité et sa capacité à rembourser la somme due. Mais comment contrôler la fiabilité d'un client dont il s'agit de la première demande de prêt ?

Plusieurs start-up américaines se sont spécialisées dans l'apport de solutions à cette question et exploitent pour cela le filon que représente la « science des data ». L'entreprise Lenddo propose ainsi d'évaluer la crédibilité des clients potentiels en observant s'ils sont amis sur les réseaux sociaux avec des personnes ayant déjà failli dans leur remboursement de crédit, ou pire s'ils communiquent régulièrement entre eux.

LendUp, société spécialisée dans le prêt en ligne de petites sommes à court terme, base sa décision d'accorder ou non un emprunt sur la seule analyse des comptes Facebook et Twitter de ses clients potentiels, à qui aucun historique de prêts n'est demandé. Enfin, l'entreprise américaine de crédit en ligne InVenture a trouvé le moyen de recueillir ses propres données via l'application de gestion de finances personnelles qu'elle propose.

Les créateurs de la société Earnest, spécialisée dans les prêts personnels, vont encore plus loin : ils travaillent à la mise au point d'un logiciel permettant de déterminer les capacités d'emprunt d'un individu, en se basant non seulement sur son utilisation des réseaux sociaux mais aussi sur des informations telles que ses habitudes d'achat, ses paiements de ses factures, son orthographe... Louis Beryl, chef exécutif d'Earnest, vise ainsi à participer au développement des « banques du futur » qu'il imagine capables de voir comment les clients remplissent leurs formulaires ou encore le temps qu'ils passent à lire les conditions et termes de leur contrat.

... mais qui reste timide en France

Si ce type de procédés vous inspire de la méfiance, pas d'affolement : la plupart des observateurs se montrent en effet plutôt dubitatifs quant au fait que la CNIL permette leur concrétisation en France.

Malgré cela, les banques de l'Hexagone comptent bien ne pas rater le train du numérique et sont de plus en plus nombreuses à nouer des partenariats avec divers réseaux sociaux afin d'avoir accès à des compétences dans le domaine de l'analyse des données et d'améliorer la connaissance de leurs clients.

Afin d'offrir une « prolongation de la relation client », la Banque postale propose par exemple dorénavant à ses clients de devenir amis sur Facebook avec leurs conseillers la Banque postale grâce à l'accord conclu avec le réseau social début juillet. La BPCE a quant à elle noué un partenariat avec Twitter dans le but de développer la possibilité d'un transfert d'argent par simple tweet.

Enfin, la BNP Paribas est allée encore plus loin puisqu'elle s'est non seulement alliée à Facebook afin de permettre l'ouverture de compte bancaire via ce réseau social, mais également à Twitter, Google et LinkedIn.