Le déploiement prochain de Linky inquiète les électrosensibles

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Les technologies de communication évoluent à grande vitesse... parfois au point de laisser en suspens la question de leur impact sur la santé. Les associations de personnes déclarées électrosensibles tirent aujourd'hui la sonnette d'alarme concernant le déploiement imminent des premiers compteurs électriques Linky. Ces compteurs intelligents, qui doivent être installés dans tous les foyers d'ici 2021, utilisent les possibilités offertes par le courant porteur en ligne (CPL) pour communiquer en permanence avec le centre de supervision du distributeur d'électricité. Une perspective qui est donc loin d'enchanter des personnes déjà incommodées au quotidien par les ondes diverses et variées qui polluent leur environnement.

Linky : un compteur porté par une nouvelle technologie de communication

Après une première phase d'expérimentation réussie dans certains sites pilotes, le projet Linky est cette fois en passe de se concrétiser dans tous les foyers français dès le mois de décembre 2015. Pas moins de 35 millions d'utilisateurs vont devoir se familiariser d'ici à 2021 avec ce nouveau compteur électrique intelligent, que sa couleur jaune canari rend facilement reconnaissable. Pour ERDF, Linky représente une avancée réelle par rapport à la précédente génération de compteurs. Capable de communiquer directement et en temps réel avec le centre de supervision du distributeur d'électricité, l'appareil devrait notamment pouvoir mesurer lui-même l'index de consommation. Il mettra ainsi un terme aux relevés manuels et aux estimations de consommation engendrant des factures d'électricité jugées exagérées. Son mode de fonctionnement n'est toutefois pas sans susciter certaines inquiétudes chez toutes les personnes souffrant d'une hypersensibilité aux ondes électromagnétiques. Le premier niveau de communication, entre le compteur et le transformateur local, assuré via la technologie du courant porteur en ligne (CPL), focalise tout particulièrement leurs craintes. Consistant à utiliser le réseau local d'électricité pour transmettre des données informatiques à très haute fréquence, le CPL engendre en effet un rayonnement certes de faible intensité mais se propageant tout le long du réseau électrique... d'autant plus difficile à éviter pour les électrosensibles donc...

Un rapport d'évaluation promis pour 2016

Alors même que les premiers compteurs Linky devraient débarquer chez les particuliers dans moins de deux mois, l'association PRIARTEM et le Collectif des Électrosensibles de France ont fini par s'emparer du sujet pour faire part de leurs inquiétudes. Reçus le 7 octobre dernier au sein de la direction générale de la Santé (DGS), les représentants de ces organisations exigent notamment une étude sérieuse et bien documentée sur les risques liés au rayonnement électromagnétique de Linky dans toutes les pièces de l'habitation. La DGS a confirmé prendre en compte les interrogations des associations d'électrosensibles, et a commandé un premier rapport d'évaluation à l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES). Bien qu'aucune date précise n'ait été fixée, les conclusions du rapport ont été promises pour le début de l'année 2016.

CPL et rayonnement : un sujet encore mal connu

La question de l'électrosensibilité et, plus globalement, celle des risques sanitaires potentiels des rayonnements électromagnétiques émis par les nouveaux appareils envahissant notre quotidien ne sont pas entièrement nouvelles. À compter de la fin des années 1990, le développement rapide des téléphones portables a mis en lumière cette nouvelle forme de souffrance et l'a fait connaître au grand public. Des nausées aux maux de tête ou aux vertiges, les symptômes déclarés sont nombreux et la communauté médicale elle-même reste en désaccord quant à la reconnaissance de la pathologie. L'ANSES s'est intéressé spécifiquement au courant porteur en ligne sous un angle sanitaire dès 2013. Dans un rapport intitulé « Radiofréquences et santé », l'agence reconnaissait alors la relative ignorance prévalant encore dans ce domaine. Elle soulignait en particulier l'absence de « réglementation précise quant aux rayonnements des dispositifs » liés au CPL. Si des normes commencent à voir le jour de l'autre côté de l'Atlantique, il est peu probable que les effets de santé du CPL soient mieux connus avant la fin du déploiement de Linky, ce qui explique la protestation des associations.

Pourra-t-on refuser l'installation de Linky ?

Le remplacement des compteurs électriques d'ancienne génération est en principe obligatoire. La date exacte pour chaque foyer est laissée à l'appréciation du distributeur ERDF, qui a pour charge d'organiser cette transition très ambitieuse en un minimum de temps. Pour autant, les associations d'électrosensibles sont ressorties de la direction générale de la santé avec quelques garanties. Ainsi, et dans l'attente de la publication du rapport de l'ANSES, une personne se déclarant électrosensible pourra légitimement refuser auprès de ERDF l'installation du compteur, sans encourir de pénalités. Cependant le prochain rapport, dans l'hypothèse où il se montrerait rassurant, ne suffira sans doute pas à calmer les craintes des électrosensibles. C'est la raison pour laquelle PRIARTEM et le Collectif des Électrosensibles entendent faire reconnaître un droit d'opposition à toute installation de compteur communicant. Nul doute que la polémique n'a pas fini de se développer !