
L'évolution du Tarif d'Utilisation des Réseaux Publics d'Électricité (TURPE), il garantit aujourd'hui 90 % des recettes d'Enedis (ex-ERDF). Le gestionnaire du réseau de distribution d'électricité est placé en situation de quasi-monopole en France métropolitaine. Tarif méconnu, le TURPE a cependant un impact significatif sur la facture d'électricité de l'usager final.
Qu'est-ce que le TURPE ?
La rémunération du coût d'acheminement de l'électricité
Tous les consommateurs payent le TURPE dans leur facture d'électricité. Il s'agit, depuis sa création en 2000, d'un tarif réglementaire et fixé annuellement par l'État (sur avis de la CRE), destiné à rémunérer les services d'acheminement de l'électricité. Il est donc reversé directement et intégralement au principal gestionnaire du réseau public d'électricité - Enedis -, au transporteur RTE ainsi qu'aux ELD, pour lesquels il représente jusqu'à 90 % du chiffre d'affaires.
Rappelons que, depuis 2004 pour les entreprises et 2007 pour les particuliers, les consommateurs ont la liberté du choix de leur fournisseur d'électricité : ils peuvent ainsi conserver un contrat avec l'opérateur historique EDF ou se tourner vers la concurrence (Direct Énergie, Planète Oui, Lampiris…).
La gestion de la distribution de l'électricité, c'est-à-dire son acheminement via le réseau public et l'entretien de ce dernier, reste en revanche un monopole public naturel, assuré par différents gestionnaires : RTE pour le transport de l'électricité via les lignes à haute et très haute tension, Enedis (ex-ERDF) pour la distribution de l'électricité pour environ 95 % du réseau restant, aux côtés de plusieurs ELD qui agissent dans certaines zones géographiques déterminées.
Le TURPE, tarif unique pour tous les gestionnaires, vise à assurer la neutralité du service rendu. C'est valable pour tous les fournisseurs et à l'adresse de l'ensemble des particuliers.
L'évolution du TURPE, c'est un calcul éminemment complexe…
Les règles de calcul du TURPE sont réputées transparentes et accessibles à tous. Ils exigeront cependant une bonne formation en mathématiques pour être comprises dans le détail ! D'un point de vue plus général, il vous suffit de retenir que le tarif est constitué de l'addition d'un certain nombre de « composantes », qui représentent les différents coûts supportés par les gestionnaires.
Les trois principales composantes sont le soutirage (fonction de la puissance et de l'option tarifaire souscrite), la gestion de la clientèle (facturation, recouvrement, accueil…) et le comptage (entretien, location, relevé du compteur électrique, dont le prix est variable selon la puissance, le modèle et la localisation de celui-ci). D'autres critères incluent la prise en compte des dépassements de consommation ou encore de l'abonnement à une alimentation de secours.
… mais soumis à certains grands principes
Au-delà des calculs et des pondérations savantes, quatre grands principes régissent le calcul du TURPE :
- La « péréquation tarifaire » implique que le coût supporté par les consommateurs est le même partout sur le territoire, indépendamment donc de leur situation géographique et du gestionnaire spécifique dont ils dépendent. Un principe essentiel dans la mesure où un foyer, comme expliqué ci-avant, n'a pas la possibilité de changer de gestionnaire.
- Corollaire de la règle précédente, le principe dit du « timbre-poste ». Il interdit de répercuter sur le consommateur la distance effective parcourue pour l'acheminement de son électricité. Qu'il habite près d'une centrale ou à des centaines de kilomètres, le tarif lié à l'acheminement doit être le même.
- La « tarification en fonction de la puissance souscrite » : la puissance souscrite par un foyer et la tension de raccordement sont deux facteurs principaux permettant de moduler le TURPE à la hausse comme à la baisse.
- L'« horo-saisonnalité » qui témoigne de la discrimination tarifaire appliquée en fonction des saisons, du jour de la semaine mais aussi de l'heure de la journée.
Comment paie-t-on le TURPE, et quel est son coût exact ?
Les ménages reliés au réseau d'électricité s'acquittent du TURPE. Souvent sans le savoir, en réglant leur facture d'électricité auprès de leur fournisseur. Il y a donc un impact sur le prix de l'électricité. C'est au fournisseur qu'il revient ensuite de reverser l'intégralité du montant au gestionnaire local du réseau. Seuls les gros consommateurs institutionnels qui bénéficient d'un contrat direct avec le gestionnaire (CARD) sont susceptibles de lui reverser directement le TURPE.
Quant à son coût moyen, l'évolution du TURPE le laisse donc dépendre, entre autres, de la puissance souscrite. On l'évalue, en règle générale, à environ la moitié du tarif hors-taxe de l'électricité. Ce qui représente 200 à 250 € par an pour un foyer moyen.
L'évolution du TURPE : une question sensible
Une réévaluation périodique…
TURPE 1 et 2, TURPE 3, 3bis et 3ter, TURPE 4, TURPE 4 HTA/BT… Depuis sa création en 2000, le tarif unique lié à l'acheminement de l'électricité a déjà connu maintes variantes. Deux calendriers différents rythment la réévaluation du TURPE.
La loi prévoit tout d'abord une révision générale de la méthode de calcul tous les quatre ans. Cette mise à jour quadriennale fait l'objet d'une étude préparatoire de la Commission de Régulation de l'Énergie, en fonction notamment de l'évolution des coûts de RTE et Enedis. Le dernier mot revient au ministre de l'Écologie, qui statue par arrêté.
On prévoit par ailleurs une révision annuelle. Non pas pour modifier la méthode de calcul mais pour revaloriser le montant de certaines composantes. Elle tient compte de l'inflation, mais aussi d'un ajustement automatique (+ 0,4 % pour le transport et +1,3 % pour la distribution). Un dernier critère, le facteur « k », est compris entre - 2 % et + 2 %. C'est lui qui permet d'ajuster le TURPE à la hausse ou à la baisse. Le calcul se fait selon que les résultats financiers des gestionnaires sont meilleurs ou moins bons que les prévisions de l'année précédente.
… en fonction de deux objectifs contradictoires
Sous des abords assez technocratiques, la méthode de révision du TURPE est en réalité conçue pour que la CRE puisse concilier deux objectifs : d'une part la préservation du pouvoir d'achat des ménages, et d'autre part la préservation des marges opérationnelles des gestionnaires et de la qualité du service.
Défend-on les intérêts du consommateur dans l'évolution du TURPE ?
Le TURPE a pour avantage de prévoir un certain nombre de dispositifs incitatifs ou dissuasifs, afin que les gestionnaires améliorent en permanence leur service.
Si les gestionnaires améliorent fortement leur productivité, au point que les anticipations de coût du précédent TURPE se révèlent trop élevées, le tarif suivant répercutera ces gains à 50 % sur les consommateurs et à 50 % sur les gestionnaires. Un bénéfice net pour ces derniers, qui ne spolies pas les particuliers. Des bonus-malus s'appliquent par ailleurs à la rémunération des gestionnaires en fonction de certains critères de qualité. Par exemple la fréquence ou la durée des coupures ou le traitement des réclamations.
Le seul inconvénient majeur du TURPE, à l'heure actuelle, reste son opacité extrême pour les non-initiés. On retiendra d'ailleurs, à ce titre, le procès remporté par le SIPPEREC contre ERDF en juin 2013. Cela a marqué l'annulation du TURPE 3 en raison du manque de transparence flagrant des tarifs jaunes et verts. D'où de lourdes indemnités à payer pour ERDF et, surtout, la révision en catastrophe du TURPE.