Tiers-payant : 1 euro symbolique en cas de retard de remboursement

Mis à jour le
minutes de lecture

La mise en place de la généralisation du tiers-payant ne suscite guère l'enthousiasme chez les médecins ! Ceux-ci craignent notamment que le remboursement de leurs consultations par l'Assurance maladie connaisse des erreurs et des retards. Pour conjurer cette inquiétude, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, avait promis un délai maximal de sept jours ouvrés pour payer les médecins, assorti d'une pénalité financière en cas de non respect de cette règle.

Les premiers éléments du décret d'application révélés le 12 avril dernier par Le Figaro devraient donc faire bondir la plupart des praticiens. Ils prévoient en effet une pénalité limitée à 1 € symbolique, et cela quelles que soient les circonstances !

Un euro symbolique pour les médecins en cas de remboursement tardif

Dans le cadre du tiers-payant généralisé, dont l'entrée en vigueur progressive est prévue à compter du 1er juillet 2016, les patients n'auront plus à avancer la part du coût de la consultation remboursable par l'Assurance maladie. C'est cette dernière qui paiera directement le médecin, dans un délai qu'un décret en cours d'élaboration limite à « sept jours ouvrés maximum » comme annoncé par la ministre de la Santé.

Ce délai par défaut de sept jours devrait s'avérer suffisant pour régler la plupart des dossiers. L'Assurance maladie fait en effet valoir que les remboursements concernant les patients déjà soumis au tiers-payant généralisé (dont les bénéficiaires de la CMU-C et de l'ACS) parviennent au médecin dans un délai moyen de trois à quatre jours ouvrés lorsque la carte vitale est utilisée.

Cependant, selon les informations obtenues par Le Figaro, le décret se montre bien peu généreux pour les professionnels de santé en cas de retard de remboursement. Ce décret ne leur accorde en effet qu'une « pénalité de un euro » par consultation, payable « au premier trimestre de l'année qui suit celle au titre de laquelle elle est due ». Ce montant devrait être invariable, quel que soit le tarif de la consultation (médecine générale ou spécialité) ou la durée effective du retard (un jour ou plusieurs mois).

La mesure ne passe pas chez les professionnels de santé

Sans surprise, les syndicats de médecins se sont vite dressés vent debout contre les modalités actuelles du projet de décret. Les garanties offertes sont jugées non seulement dérisoires, mais surtout inopérantes dans la mesure où le paiement de la pénalité ne sera sans doute pas automatique mais soumis à la demande du médecin. Difficile d'imaginer que la Sécurité sociale serait prompte à s'auto-pénaliser ! Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, fait valoir qu'aucun médecin ne pourra prendre le temps de revoir sa comptabilité pour y débusquer les retards de paiement, le tout pour un euro symbolique payé l'année suivante. Ces garanties ont donc été qualifiées de « ridicules » et semblent tout bonnement indiquer selon la CSMF que l' « on se moque du monde » !

Même les médecins les plus tatillons pourraient ne pas être en mesure de faire valoir correctement leur droit à indemnité. Le projet de décret soumet en effet le paiement de cette pénalité à la condition que la carte vitale du patient « ne soit pas inscrite sur la liste d'opposition » qui recense les cartes perdues et volées. Or, Claude Leicher, président de MG France, souligne à juste titre que les médecins n'ont pas accès à cette liste.

Quel calendrier ?

Selon toute logique, le décret relatif au délai de remboursement des médecins et à la pénalité en cas de retard devrait entrer en vigueur le 1er juillet 2016, soit le même jour que l'application du tiers-payant généralisé aux patients remboursés à 100 % par la Sécurité sociale (femmes enceintes et patients en ALD).

Tous les autres patients devraient ensuite passer au tiers-payant à compter du 1er janvier 2017, ou au plus tard avant le 30 novembre de l'année prochaine.

Le comité de pilotage voit le jour

Le dossier du tiers-payant généralisé, qui a déjà connu plusieurs épisodes douloureux au cours des derniers mois, a désormais officiellement un pilote. Un décret du 13 avril procède, comme convenu, à la création d'un comité de pilotage dont la durée de vie est fixée à trois ans. Ce comité devra se réunir au moins deux fois par an.

Composé de représentants des patients, des médecins, des mutuelles, des organismes d'Assurance maladie et de l'État, il aura pour rôle de surveiller les différentes étapes de la mise en œuvre du tiers-payant. Il pourra émettre des « recommandations » pour optimiser la phase de transition et surtout pour « faciliter l'exercice [du tiers-payant] par les professionnels de santé ». Il s'agit là d'une manière pudique d'indiquer que le comité de pilotage devrait en réalité surtout faire office de médiateur auprès des médecins dans les mois à venir !