Le plan de reconquête des usagers du gaz par GRDF

Mis à jour le
minutes de lecture

Les participants au CERAWeek de Houston, réunissant les leaders mondiaux du marché de l'énergie, parmi lesquels il nous faut citer Chevron, Petrobras ou encore Shell Oil Company, en sont unanimement convaincus : le gaz est l'énergie de demain, celle qui enregistrera une croissance forte et constante, estimée à hauteur de 1,6 % par an d'ici à 2035. Si le groupe GRDF, représenté à l'occasion de ce sommet, rejoint l'analyse de ses confrères, l'ancien opérateur historique doit cependant faire face à une équation plus complexe à résoudre sur le terrain français. 

Le nombre de clients raccordés au gaz ne cesse pas de chuter

En effet, en France, et comme le rappelle dans ses colonnes Le Monde, le nombre de clients raccordés au gaz n'a de cesse de baisser depuis 2008, alors même que celui-ci avait progressé à un rythme annuel moyen de 150 000 nouveaux clients depuis 2000. Et si, sur le papier, les résultats financiers qu'affiche GRDF pour l'exercice fiscal 2013 semblent bons – 3,44 milliards d'euros de chiffre d'affaires, en hausse de 11 % pour un bénéfice net s'établissant à 198 millions d'euros ; cette bonne santé financière pourrait bien être en trompe-l'œil. Soulignons à ce propos que les résultats de la filiale de GDF Suez ont été tirés vers le haut par les conditions climatiques exceptionnelles ayant touché l'Hexagone lors du premier semestre 2013.

Le « gaz cuisson » en forte baisse, quand le « gaz chauffage » gagne du terrain

« Nous allons essayer d'arrêter d'en perdre [des clients (NDLR)]. L'an dernier, nous en avons encore perdu 5 000, l'objectif est de repasser en positif », a confessé Sandra Lagumina, directrice de GRDF à l'adresse du quotidien du soir. En chiffres absolus, le nombre d'abonnés raccordés au gaz par l'opérateur historique s'établit à 10,9 millions en 2013. Dans le détail, Jean Lemaistre, directeur général adjoint de la filiale de GDF-Suez, entend nuancer ce bilan : si ces pertes concernent principalement le « gaz cuisson », c'est-à-dire, des consommateurs n'utilisant le gaz de réseau que pour la cuisine, « le nombre de clients chauffage n'a pas cessé d'augmenter ». Alors que la France s'est engagée à réduire de 30 % sa consommation d'hydrocarbures d'ici à 2030, la patronne de GRDF se veut claire : l'objectif de son entreprise « n'est pas de redresser cette courbe [de baisse des clients] ». Mais plutôt d'intégrer l'énergie gazière au cœur de la transition énergétique appelée de ses vœux par le gouvernement. 

L'extension du gaz aux transports, au cœur de la transition énergétique

À un horizon court-termiste, l'ancien monopole d'État fonde beaucoup d'espoir dans le développement de « gaz propre » tel que le biométhane, produit à partir des déchets agricoles et ménagers. Issu de l'épuration du biogaz, le biométhane – la version renouvelable d'origine biologique du gaz naturel – s'inscrit ainsi en plein cœur du dispositif pensé par l'opérateur historique en vue d'une intégration réussie de GRDF dans le scénario gouvernemental de transition énergétique. Ce faisant, GRDF rejoint l'ambition fixée par Bruxelles de porter à hauteur de 10 % la part d'énergies renouvelables dans les transports collectifs urbains d'ici à 2020. À cet effet, le GNV, autre extension possible de l'usage du gaz, est une piste prometteuse aux yeux de l'entreprise, laquelle pourrait de ce biais regagner sur la durée des parts de marché significatives. 

Gazpar redonnera-t-il un second souffle à GRDF ?

Par ailleurs, afin d'enrayer ce recul des abonnés au gaz, le principal distributeur gazier en France prévoit de lancer une campagne grand-public en vue de redynamiser la filière, en relative perte de vitesse. Prévue pour septembre, selon des informations avancées par Les Échos, cette action de communication ambitionne de constituer une parade efficace à la vague de désabonnements affectant l'ancien monopole public. Cette campagne de sensibilisation sera-t-elle orientée vers Gazpar, le nouveau compteur de gaz communicant ? Très peu d'informations circulent à ce sujet. L'on sait seulement que GRDF a rendu public fin février le choix de ses fournisseurs clés. Les principales entreprises chargées de la production de ces futurs compteurs communicants, équivalents aux compteurs Linky pour l'électricité, sont les sociétés AEM/Sagemcom, ITRON et Dresser/Sappel. 

Gazpar, ou le pari de l'intelligence de l'énergie

Pour rappel, Gazpar est un compteur intelligent de nouvelle génération visant à intégrer d'ici à 2022 près de 11 millions de foyers français. Sa conception technologique a été imaginée en réponse à deux objectifs majeurs : fournir des données quotidiennes aux clients et améliorer la qualité de la facturation. « Grâce à Gazpar, les clients seront facturés sur leur consommation réelle à l'instant « T » et non plus sur la base d'estimations, source de contestation », détaille Mme Lagumina au quotidien Le Figaro. « Par ailleurs, de nombreuses opérations pourront être effectuées à distance, à commencer par la relève des compteurs ». Principal avantage avancé en faveur de l'usager : la possibilité de suivre sa consommation en temps réel et ainsi être en mesure de la réguler au plus près de ses besoins et dans le respect de son budget énergie.

Le succès espéré de Gazpar sera-t-il suffisant pour redonner le sourire à la filiale de GDF-Suez ? L'entreprise elle-même semble insister sur la dimension « pilote » dudit projet. Et ne cache rien de ses velléités d'export à venir du compteur, une initiative « très suivie à l'étranger, et qui pourrait ouvrir des pistes à nos industriels »...