Les avantages des salariés EDF appartiennent-ils à une autre époque ?
Le « tarif agent » consiste, pour les clients éligibles, à ne payer que 5 à 10 % du montant des tarifs EDF. Ce fut mis en place peu après la guerre, à une époque où la main-d'œuvre se faisait excessivement rare. Il convenait donc de la fidéliser par tous les moyens. Malgré la modification de la situation économique, le tarif préférentiel est un des avantages appliqués aux salariés d'EDF et GDF qui a été maintenu en tant qu'acquis social. Ce maintien était là pour compenser officieusement la faiblesse de certaines rémunérations en début de carrière. Le tarif agent, considéré comme un avantage en nature aux yeux du Trésor Public, doit intégrer la déclaration des revenus.
Il est considéré par certains comme un véritable privilège difficile à conserver en l'état en ces temps de crise et de tarification progressive de l'énergie. Les syndicats rappellent bien volontiers que les salaires des agents en début de carrière flirtent avec le niveau du SMIC. Dès lors, les tarifs préférentiels en électricité dont jouissent les agents est le petit plus qui fait la différence.
Avantages des salariés EDF : un privilège étendu, valable pour toute la vie
Le mécanisme du tarif agent ne connaît que très peu de limites théoriques. Il est applicable quel que soit le niveau de consommation réel du foyer et le nombre de personnes y résidant. Surtout, il concerne aussi bien les employés actifs que les retraités d'EDF et GDF. Il s'agit alors d'un nombre important, comprenant 300.000 foyers bénéficiaires au total. Le tarif préférentiel est garanti jusqu'au décès de l'ancien agent. Il s'applique indifféremment pour sa résidence principale et sa résidence secondaire. Il est même possible, en s'acquittant de rapides formalités, d'intégrer la consommation réalisée dans une résidence de vacances.
Avantages des salariés EDF : un coût important répercuté sur les factures des autres usagers
La réduction de 90 à 95 % consentie aux foyers des agents entraîne un sévère manque à gagner pour EDF. On estime un manque à gagner d'environ 222 millions d'euros pour l'année 2010. La structure de la pyramide des âges, associée à l'augmentation régulière du tarif EDF, devrait contribuer à faire gonfler encore davantage ce chiffre dans les années à venir. L'augmentation des factures des usagers traditionnels compense mécaniquement cette perte sèche, difficile à justifier.
La première tentative du MEDEF
Aujourd'hui c'est Dominique Tian, député UMP, qui dénonce ces avantages. Mais en 2011, c'était le MEDEF qui questionnait cet acquis représentant une lourde charge pour les 2 majors de l'énergie. EDF et GDF doivent en effet acquitter les différentes taxes sans les répercuter sur leurs salariés consommateurs. En avril 2011 une journée de manifestations et de grève largement suivies avait sanctionné cette menace à peine voilée sur les acquis du personnel de l'énergie et qui rappelait aux bons souvenirs de tous que les salariés et retraités de EDF et GDF-SUEZ Suez profitaient également du comité d'entreprise (CCAS) le plus riche de France.
Quelles pistes de réforme pour le tarif agent ?
Allant au-delà du simple constat, la Cour des comptes ne manque pas de suggérer un certain nombre de pistes qui, sans aller jusqu'à la suppression pure et simple de cet avantage en nature, contribueraient à le rendre plus juste et moins « exorbitant ». Le rapport évoque notamment la possibilité de passer à un avantage plafonné : au-delà d'un certain niveau de consommation, un tarif normal ou un peu moins avantageux pourrait s'appliquer.
Une proposition qui fait sens au vu des discussions engagées chez certains fournisseurs d'énergie pour passer à une tarification progressive, par paliers de consommation. Il reste néanmoins difficile de prédire si le mécanisme sera réellement repensé dans la période à venir. Le député Tian, en 2012, avait déposé plusieurs amendements à la proposition de loi relative à la tarification de l'énergie. Il voulait alors ramener le tarif agent à 50 % du tarif standard. Une autre possibilité était de le faire débloquer par le paiement d'une contribution libératoire.
Le tarif agent “n'incite(rait) pas les agents d'EDF et de GDF-SUEZ à faire des économies” et serait “contraire à l'esprit du Grenelle”, a également plaidé Dominique Tian.
Une proposition qui, si adoptée par le Parlement, risque fort de mettre le feu aux poudres dans le climat social particulièrement dégradé actuel. D'autant plus que le tarif agent est une question tabou.
