Des contrats de santé labellisés pour les seniors, un bon plan ?

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Un récent rapport de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) l'avait déjà noté : le coût de la couverture santé après la retraite tend à flamber et à exclure un grand nombre de personnes âgées d'un accès normal aux soins. Difficile en effet de conserver son ancienne mutuelle d'entreprise et d'assumer la part autrefois financée par l'employeur, d'autant que les garanties ne sont plus toujours adaptées.

D'un autre côté, il n'est pas toujours simple non plus de souscrire une mutuelle senior souvent fort onéreuse, à plus de 100 ou 150 € par mois. Un décret du 27 avril dernier prévoit la création dès le 1er janvier 2017 d'un label public et officiel dédié aux complémentaires santé senior qui offrent le meilleur rapport qualité/prix. De quoi s'agit-il, et que peuvent en attendre les principaux concernés ?

Mutuelle senior labellisée : un premier décret préparatoire

Labelliser les complémentaires santé les plus adaptées aux besoins des plus de 65 ans ? L'idée avait été annoncée par le président de la République lors du congrès annuel de la Mutualité Française tenu en juin 2015. Ensuite retranscrite dans l'article 33 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016, elle restait cependant jusqu'à présent une simple déclaration d'intention.

Paru au Journal officiel du 27 avril dernier, le décret n°2016-509 constitue le début de la mise en œuvre pratique de ce projet, qui vise à généraliser la couverture santé complémentaire chez les seniors. Deux autres textes réglementaires devraient suivre avant la fin de l'année, pour une entrée en application au 1er janvier 2017.

Trois niveaux de garantie et un cahier des charges à respecter

Dans l'esprit, les futurs contrats labellisés pour les seniors seront assez comparables au dispositif des contrats « responsables ». L'État va fixer aux assureurs et aux mutualistes un cahier des charges à respecter. Ce cahier des charges comprendra notamment un panier de soins qui devrait inclure des planchers et/ou des plafonds de remboursements ainsi qu'un tarif maximal. En contrepartie du respect des conditions du label, les organismes complémentaires pourront bénéficier d'un crédit d'impôt annuel égal à 1 % de la taxe CMU. Contrairement à une hypothèse initialement envisagée par le gouvernement, le nombre de contrats labellisés ne sera pas limité. Tout assureur respectant les critères devrait donc pouvoir obtenir le label.

Les contrats labellisés devront proposer à l'assuré trois niveaux de garantie au choix, ni plus, ni moins. La nature, le contenu et le tarif maximal de ces paliers restent à définir dans le cadre des prochains décrets. Ils devraient cependant fortement s'inspirer du dispositif des contrats éligibles à l'ACS, avec trois gammes de type « simple », « intermédiaire » et « complète ». Le gouvernement devra tout d'abord solliciter l'avis de l'Autorité de la concurrence et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (APCR) avant de trancher.

L'attribution des labels sera quant à elle du ressort du Fonds CMU et relèvera d'une procédure qui devra être précisée par un texte ultérieur.

Le précédent des contrats éligibles à l'ACS

La future labellisation des complémentaires santé pour senior ne constitue pas une première. Selon le même principe, depuis le 1er juillet 2015, le gouvernement a choisi d'attribuer un autre label à une étroite sélection de onze mutuelles et complémentaires santé destinées aux bénéficiaires de l'Aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS). Là aussi, le dispositif s'appuie sur trois niveaux de garantie. Cependant, il a ici un caractère obligatoire : ses bénéficiaires doivent faire leur choix parmi onze formules, retenues en raison de leurs tarifs favorables.

Un premier bilan d'étape après neuf mois révèle une baisse sensible du coût de la complémentaire santé pour ce public fragilisé, qui paie désormais son contrat 15 à 37 % moins cher.

La labellisation : un principe qui fait débat

Sous couvert de bonnes intentions, la labellisation des complémentaires santé pour les seniors ou pour d'autres catégories de la population fait débat. Une vague de critiques s'était déjà élevée contre l'introduction dans le PLFSS pour 2016 de contrats dédiés aux seniors. La Mutualité Française craint par ailleurs une déstabilisation durable du marché et déplore une logique de « segmentation des risques » en complète opposition avec l'esprit mutualiste et solidaire.

À terme, le risque consiste à faire peser sur les autres assurés le coût de ces contrats excessivement régulés et administrés. En entrant dans le dispositif, les assureurs se lient les mains et ne sont plus libres de faire évoluer leurs tarifs à leur guise. Dans le cadre d'un contrat labellisé, c'est l'État qui aura le dernier mot pour décider d'une revalorisation des tarifs. Or, l'indexation envisagée par les autorités publiques sur l'« objectif national des dépenses d'assurance maladie » (ONDAM) risque fort de se révéler insuffisante pour couvrir les coûts croissants des assureurs, confrontés aux besoins de santé d'une population vieillissante.