Fronde des professionnels de l’optique contre le plafonnement des complémentaires

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Plafonnement des remboursements d'optique

Alors que les décrets d'application visant à fixer les plafonds de prise en charge des dépenses d'optique par les complémentaires font l'objet de discussions parmi le gouvernement, les professionnels du secteur font bloc en vue de dénoncer à l'unisson les menaces que ferait peser ce projet sur l'avenir de la filière en France.

Le gouvernement veut faire baisser le prix des lunettes en France

Comme l'a récemment rappelé la Cour des comptes, la France est la championne européenne de la cherté de l'optique. Pour l'heure, le marché s'élève à 5,5 milliards d'euros l'an, dont quelques 3 milliards sont pris en charge par les mutuelles. Le gouvernement a donc fait part de sa volonté de réguler à la baisse ces sommes astronomiques, via l'application de plafonds de remboursement dégressifs sur cinq ans. 

En limitant le montant maximum des remboursements par les complémentaires santé, le gouvernement espère par ce biais inciter les opticiens à réduire leurs prix via une concurrence revigorée. Mais ce n'est pas tout. À l'heure où le gouvernement cherche à économiser près de 10 milliards d'euros sur les dépenses publiques de santé, cette baisse attendue bénéficierait également à l'équilibre des comptes de l'Assurance maladie, qui souffrent eux aussi des prix élevés de l'optique.

La filière optique « made in France » et ses 100 000 emplois menacés ?

C'est toutefois sans compter sur l'opposition farouche des opticiens et professionnels de l'optique en France. Et ces derniers de lancer un cri d'alarme. Les plafonds envisagés par le gouvernement seraient insuffisamment élevés en vue de pérenniser l'avenir de la filière. La menace pesant sur l'emploi constitue en ce sens un leitmotiv dans la bouche des dirigeants. Paul du Saillant, directeur adjoint d'Essilor a martelé l'argument de l'emploi à l'occasion d'un entretien accordé au Monde, allant même jusqu'à évoquer « la casse d'une filière industrielle de pointe ». 

Même son de cloche du côté de Didier Papaz, PDG du groupe Optic 2000. Selon ce capitaine d'industrie, l'ensemble de la chaîne de la filière optique – de la fabrication à la distribution – serait directement menacé par ce projet gouvernemental. Mais au-delà du seul risque pesant sur l'emploi, le dirigeant entend pointer du doigt un second biais contenu par cette même réforme. À l'en croire, les professionnels de l'optique ne seraient pas les seuls à faire les frais de ce plafonnement. 

Les consommateurs seraient in fine tout autant lésés. Et M. Papaz de s'enquérir sur le plateau de BFM Business : « Si on perd notre savoir-faire, c'est fini, tout sera fabriqué en Chine. Avec quelles garanties, quels contrôles […] ? » Car tout autant que l'emploi, les professionnels redoutent que la position d'excellence mondiale acquise par la France dans l'optique soit la victime collatérale de ce bras de fer engagé d'avec le gouvernement.

En sus de la tournée médiatique orchestrée par les principaux dirigeants du secteur de l'optique, une pétition a été lancée début avril en vue d'alerter le président de la République contre le « déremboursement déguisé des équipements optiques ». Au 5 mai, celle-ci comptait un peu plus de 7 500 paraphes seulement. De même, à l'initiative de l'opticien Krys Group, a été réalisé un sondage paru ce jour, avançant que 60 % des Français seraient opposés au plafonnement du remboursement des lunettes ; ce projet risquant même d'avoir des conséquences négatives sur la qualité des soins oculaires selon deux tiers des sondés.