Économies en santé : Touraine promet d’épargner le portefeuille des Français

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Des mesures d'économies affectant les dépenses de l'Assurance-maladie avaient été annoncées par Manuel Valls, puisque participant au « programme de stabilité » de 50 milliards d'euros arbitré par le nouveau Premier ministre en vue de redresser les comptes publics. L'on en sait désormais plus à ce sujet via des confidences faites par sa consœur dans un entretien paru aujourd'hui dans le quotidien Les Échos. 

Économies sur l'Assurance-maladie : les confidences de Marisol Touraine

Les prix des médicaments ne devraient plus progresser d'ici à la fin du quinquennat

« Nous consommons trop de médicaments, trop de médicaments de marque et trop de médicaments chers ». Ce sont en ces termes que Marisol Touraine entend pointer du doigt l'un des axes majeurs poursuivi par son plan d'économies. Des 10 milliards d'euros visés, plus d'un tiers devrait ainsi reposer sur les épaules de l'industrie pharmaceutique. Pour ce faire, les Affaires Sociales entendent non seulement baisser les prix des médicaments mais également favoriser la prescription tout comme la délivrance de génériques. À ce sujet, le gouvernement envisage de lancer une nouvelle campagne d'information auprès de l'opinion afin de « dissiper les doutes qui subsistent sur la qualité des génériques ». 

Rappelons que ce n'est pas la première fois que l'industrie pharmaceutique est contrainte de se serrer la ceinture. La baisse des prix des médicaments est un levier d'économies substantielles qui a été régulièrement actionné par les différents gouvernements qui se sont tour à tour succédé, et ce, toute couleur politique confondue. En moyenne et depuis 2005, la baisse des prix a atteint le milliard d'euros chaque année, toujours dans l'objectif de réduire le déficit de la Sécurité sociale. Par ailleurs, la progression des génériques est elle aussi une arme efficace. Les pharmaciens sont en effet financièrement incités à les proposer autant que faire se peut, alors même que les patients qui les refusent doivent faire l'avance des frais.

Une opération sur deux sans hébergement hospitalier à l'horizon 2016

Autre piste dévoilée par la ministre : la chirurgie ambulatoire sera largement encouragée. Alors que la coopération ville-hôpital est appelée à être renforcée, les interventions en service ambulatoire – lesquelles permettent au patient de sortir le jour même de l'hôpital – devraient représenter d'ici à 2016 une opération sur deux. À titre d'exemple, l'opération de la cataracte peut, à terme, être réalisée à 100 % en ambulatoire, cite Mme Touraine à l'appui de sa démonstration. « 1,5 milliard pourra être économisé sur trois ans dans ce domaine, dont près de 1 milliard pour la chirurgie ambulatoire », précise-t-elle encore.

Autre axe défendu, une optimisation de la coopération entre la médecine de ville, l'hôpital et les maisons de retraite. Le gouvernement entend ainsi placer l'accent sur les soins de proximité. De plus, le secteur hospitalier est appelé à faire preuve de davantage de rigueur dans sa gestion, notamment concernant la mutualisation des dépenses en fonds propres. Enfin, des mesures seront prises en vue d'endiguer « le recours excessif aux médecins intérimaires, qui coûtent trop cher aux établissements publics ».

L'amplification de la lutte contre les « actes inutiles » et la fraude

Des économies à hauteur de 2,5 milliards d'euros sont également attendues via une accentuation de la chasse aux « actes inutiles et redondants ». De même, la ministre a fait part de sa volonté de prendre de nouvelles « mesures de lutte contre la fraude », sans toutefois en dévoiler la teneur. Ces économies, lesquelles impliquent une meilleure maîtrise des dépenses de santé, sont appelées à aller crescendo, d'autant plus que le vieillissement de la population française ne cesse de s'amplifier.

Enfin, Mme Touraine s'est également fait l'écho de la volonté du gouvernement de voir se mettre en place sous peu des « listes de médicaments recommandés, établies par les médecins pour chaque spécialité », et ce, en vue de faciliter la qualité de la prescription.

« Ni déremboursements, ni nouvelles franchises » à prévoir pour les patients

Chaque année, un objectif de progression est fixé par le gouvernement puis inscrit au sein du budget de la Sécurité sociale. Pour 2015, l'ONDAM a été fixé à 2,1 %, puis 2 % en 2016 et 1,9 % en 2017, précise la ministre. Concrètement, le gouvernement s'engage ici à ce que ces dépenses ne progressent pas de plus de 2 % par an en moyenne d'ici à la fin du quinquennat, soit l'équivalent du niveau le plus bas jamais atteint depuis... 1997 !

En ce sens, l'on comprend aisément que Mme Touraine parle « d'efforts sans précédent » en vue d'entraîner à la baisse les dépenses publiques de santé. Toutefois, celle-ci se veut catégorique : « ces réformes […] n'aboutiront pas à un système de santé « low cost », mais au contraire, à préserver l'excellence [du] modèle, son excellence médicale mais aussi son excellence sociale ». À ce sujet, la ministre met un point d'honneur à assurer que « les patients ne seront ni moins bien soignés ni moins bien remboursés », étant donné qu'il n'y aura « ni déremboursements ni nouvelles franchises ».

Alors que le gouvernement a déjà donné un premier coup de vis en s'engageant à établir un plafonnement progressif des remboursements opérés par les complémentaires santé sur les frais d'optique, les dépenses de santé n'en ont visiblement pas terminé d'avec leur « cure d'amaigrissement ».

Première levée de boucliers de la CSMF contre « un plan inique et inacceptable »

À l'annonce des détails de ce plan d'économies, les réactions n'ont pas tardé à pleuvoir. Telle celle de la CSMF, premier syndicat médical français, laquelle a fait savoir sa profonde inquiétude face à une série de mesures jugées « iniques » et « inacceptables ». L'organisation syndicale s'élève notamment contre ce qui lui paraît être une remise en cause de la liberté de prescription des médecins libéraux. Cette volonté prêtée au gouvernement s'apparente ainsi à ses yeux à « une logique de maîtrise comptable dont la première victime sera le patient ». En effet, poursuit la CSMF, en imposant « une médecine normative et le rationnement des prescriptions », les pouvoirs publics prennent ici « le risque de modifier la relation médecin-patient ainsi que la qualité des soins ».