Participation aux bénéfices de l'assurance de prêt : l'UFC déboutée

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Les magistrats, non sans avoir préalablement consulté des communications officielles de Bercy et même un universitaire, ont donné tort à l'association de consommateurs, qui exigeait que les emprunteurs d'un crédit immobilier ou d'un crédit à la consommation puissent enfin recevoir une participation aux bénéfices générés par leur assurance de prêt.

Un intéressement qui, selon UFC, leur est dû par la loi. Le débat, toutefois, est loin d'être clos et se poursuivra en appel.

À l'origine du contentieux : la participation aux bénéfices

De quoi s'agit-il exactement ? Lorsqu'un particulier souhaite souscrire un crédit immobilier ou un crédit à la consommation, il n'a pas le choix : le prêteur, c'est-à-dire la banque ou l'organisme de crédit, va invariablement lui réclamer une assurance de prêt, même lorsqu'elle n'est pas strictement obligatoire selon la loi. L'emprunteur va donc choisir une formule d'assurance, proposée soit par la banque elle-même, soit par un assureur tiers.

Dans les deux cas, la prime payée chaque mois ou chaque année par l'emprunteur tend à être volontairement surestimée par l'assurance, notamment parce que les risques (décès, invalidité…) sont parfois difficiles à estimer avec précision. La manne financière ainsi générée représente pour l'assureur des « bénéfices techniques ». Ces derniers sont par ailleurs placés par l'assureur sur les marchés et génèrent des intérêts : il s'agit des « bénéfices financiers ».

Afin de compenser ces sommes payées indûment, l'article L. 331-3 du Code des assurances, en vigueur depuis le 1er juillet 1994, précise que les assureurs « doivent faire participer les assurés aux bénéfices techniques et financiers qu'elles réalisent », sans toutefois en préciser les modalités pratiques. Ces dispositions, de ce fait, sont actuellement appliquées d'une façon fort éloignée de la volonté initiale du Législateur : les assureurs, en pratique, reversent cette participation aux prêteurs, qui n'en font ement profiter les emprunteurs.

Des sommes importantes en jeu

Le site Internet actioncivile.com, dédié aux actions de justice en groupe, a déjà pu estimer que la somme des bénéfices techniques et financiers représentait un montant considérable. Pour un crédit immobilier, et lorsque le risque ne se réalise pas, l'emprunteur pourrait légitimement attendre une participation de 40 % sur la totalité des primes versées, soit par exemple 3 600 € pour une assurance de 50 € par mois pendant quinze ans. Dans le cas d'un crédit à la consommation, les bénéfices réalisés indûment sur les emprunteurs atteindraient même 70 % de l'ensemble des primes !

Une décision défavorable aux emprunteurs…

Le tribunal de grande instance de Paris, dans sa décision du mardi 23 septembre, confirme que les assureurs sont effectivement soumis par la loi au reversement des bénéfices techniques et financiers, mais estime que les emprunteurs ne peuvent se prévaloir d'un droit individuel sur ces bénéfices. La juridiction, par ces termes, constate en fait que les dispositions du Code des assurances ne sont pas suffisamment explicites pour que chaque emprunteur, en cas de non réalisation du risque, se permette de réclamer à son assureur un tel retour sur investissement.

En l'espèce, les emprunteurs qui avaient saisi le tribunal avec l'aide d'UFC-Que Choisir avaient contracté un crédit à la consommation chez Cofidis, assorti d'une assurance de prêt chez CNP Assurances.

La décision rendue mardi confirme donc la réalité de la participation aux bénéfices, sans préciser toutefois le devenir des sommes en jeu : elle privilégie la sécurité financière des organismes de crédit, mais créé par la même occasion un certain vide juridique.

…qui va se solder par un appel

La poursuite du contentieux en appel ne fait donc guère de doute : le président de l'association, Alain Bazot, rappelle que son organisation dispose de plusieurs arguments solides. Le contrat passé entre Cofidis et CNP Assurances, notamment, prévoit explicitement la possibilité d'une participation aux bénéfices.

Un récent arrêt du Conseil d'État, rendu le 23 avril 2012, estimait par ailleurs que les contrats d'assurance décès (soit une composante essentielle de toute assurance de prêt) ne pouvaient être exclus du champ de la participation aux bénéfices. Il est vrai que la haute juridiction administrative n'avait pas eu un mot sur le droit individuel des emprunteurs à réclamer une part des fameux bénéfices.

La décision définitive sur ce dossier, quelle que soit sa teneur, sera examinée avec une attention scrupuleuse par les assureurs, les banques et bien sûr par les assurés eux-mêmes.

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